mardi 9 février 2010

Pendant les Victoires de la musique, Alain Planès joue Chopin. Ailleurs.

Qu’y a-t-il en dehors des Victoires de la Musique, les soirs de Victoires de la Musique ? Eh bien, des concerts, c'est-à-dire des manifestations qui n’ont pas grand-chose à voir avec les Victoire de la Musique. Au Corum de Montpellier, où les Victoires ont lieu cette année, l’atmosphère est à la fête. Gérard Pangon a l’œil sur son poste de télévision :
« Les Victoires de la Musique classique, c'est comme les Césars ou les Molières : chaque année, on se persuade ça ne vaut la peine de gâcher sa soirée, que les slurps et les bisous vont dégouliner, que les plus insipides vont se prendre pour Brad Pitt, les plus ternes se déguiser en Castafiore et les plus niais se croire aussi malins que Jean-Luc Godard. Mais chaque année, on finit quand même devant sa télé, juste pour voir comment ça se présente. Et trois heures plus tard, sans avoir bougé, on se dit : « L'année prochaine, on ne m'y reprendra plus. » Seulement voilà : cette fois-ci, il y a eu un truc. D'abord un programme aux petits oignons : danses polovtsiennes pour commencer, puis Hélène Grimaud dans le Concerto en sol de Ravel, Vadim Repin dans Brahms, Vivica Genaux triomphante même si les gros plans ne l'arrangent pas, Hervé Niquet parfait dans un rôle de faire valoir avec Shirley et Dino, un trio harpe, scie musicale et cor des Alpes qui arrive au bon moment, Alexandre Tharaud magnifique dans un Nocturne de Chopin. Un vrai rythme, des éclairages qui évitent le côté supermarché, une réalisation qui suit la musique... de quoi montrer que le classique n'est pas une affaire de vieux, ni de ringards, ni de refoulés. Mieux : on a oublié les commentaires de Frédéric Lodéon, qui n'a pourtant pas ménagé sa peine : « Philippe Jarrousky est un contre-ténor, pas un castrat : il le précise toujours, pas besoin d'aller vérifier. » ou bien « Chabrier le bon gros Auvergnat, compositeur néanmoins. » Quant au palmarès, c'est une autre histoire... »
Pendant ce temps-là, aux Bouffes du Nord transformé en cirque pour le spectacle de Joël Pommerat Cercles-fictions, Alain Planès joue sur instrument d’époque le programme du récital donné par Chopin dans les salons Pleyel le 21 février 1842. La salle est bondée, le public plus jeune, plus théâtre que celui des circuits traditionnels. Le piano Pleyel (1836) nous emmène lui aussi ailleurs, loin de la tradition du vite et fort. Planès enchaîne Nocturnes, Préludes, Etudes et Mazurkas avec délié, comme un monologue à mi-voix. On se fait à ce son boisé, à cette disparité entre le grave et l’aigu, à ces touches qui n’obéissent pas au doigt et à l’œil. Un régal pour initiés, diront les fidèles des Victoires. Déjà à l’époque, Berlioz reprochait à Chopin de jouer trop doucement, et Liszt s’amusait à imiter le toucher aérien de ce confrère qui était son contraire. Berlioz et Liszt auraient participé aux fastes télévisuels de Montpellier. Chopin, lui, aurait joué pour ses amis. Liszt a été le premier biographe de Chopin. Les contraires s’attirent.

Chopin chez Pleyel. Alain Planès (piano Pleyel, 1836). 1 CD Harmonia Mundi.

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