dimanche 28 février 2010

Festival de Pâques de Salzbourg : et si Vienne chassait Berlin ?

Du Rififi à Salzbourg, nouvel épisode du thriller. Pendant que la justice s’occupe des gestionnaires indélicats, la réorganisation du festival de Pâques a des ratés. Premier accroc : le Fonds pour le développement du tourisme, acteur majeur de la manifestation, se retire. Tollé de l’Orchestre Philharmonique de Berlin, qui avait posé son soutien comme condition à sa participation au festival jusqu’en 2013. Que vont faire les sponsors privés, pourvoyeurs de l’essentiel des subsides (6 millions d’euros) nécessaires à la bonne marche du festival ? C’est cependant de l’extérieur que vient le coup de pied de l’âne : le nouveau directeur musical de l’Opéra de Vienne, Franz Welser-Möst, propose de remplacer le Philharmonique de Berlin par celui de Vienne, dans des conditions financières plus intéressantes. La manœuvre est habile : le Philharmonique de Vienne, orchestre en résidence au festival d’été de Salzbourg, chasserait enfin son rival berlinois, imposé par Karajan et roi du festival de Pâques depuis 1967. Cela relance en tout cas la possibilité, évoquée puis démentie, d’une émigration de la manifestation à Baden-Baden, dont le Festspielhaus doit beaucoup à Eliette, la veuve de Karajan, et ressemble comme un frère à celui de Salzbourg. Et tout cela au moment où l’on annonce que la Fondation Herbert von Karajan Festival de Pâques perdrait une grande partie de ses prérogatives ! L’affaire se complique encore si l’on songe que Klaus Kretschmer, soupçonné d’avoir détourné 800 000 euros et retrouvé blessé sous un pont du haut duquel il s’était jeté, émargeait en sous-main au festival de Pâques, mais était directeur technique du festival d’été. Et si, pour les beaux jours, une saison 2 se préparait ?

samedi 27 février 2010

L’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris : où sont les futures stars ?

Concert d’airs russes et français au Palais Garnier, par l’Atelier Lyrique de l’Opéra. Le titre dit tout, et la salle est pleine, avec des gens, mêlés aux habitués, qu’on ne voit pas souvent sous les ors et les stucs. Ce soir, pour un prix relativement modique, on peut s’offrir de belles voix dans un lieu de rêve. Pour les douze solistes de l’Atelier, ce n’est pas rien de chanter sur cette scène-là. Ce sont de jeunes professionnels, ils ont déjà du métier, et ils sont devenus, dans le cadre de l’Atelier, de véritables coureurs de décathlon. On les a vus, à l’Amphithéâtre Bastille, passer de L’Enfant et les Sortilèges de Ravel à un petit opéra comique de Dauvergne, au Louvre rendre hommage à Schubert et à l’Athénée à Messiaen. Mais Garnier, avec l’Orchestre de l’Opéra venu entre deux répétitions de l’Or du Rhin… A force d’entendre et de lire que la seconde salle (en nombre de sièges) de l’Opéra est une bonbonnière alors que Bastille est un vaisseau, on oublie qu’elle est tout de même très grande, et qu’elle donne, aux dires de nombreux chanteurs, une impression de vertige que l’on n’a pas ailleurs. L’effet est étrange d’entendre ces voix très travaillées mais encore fragiles, portées par cette acoustique enveloppante et impitoyable. Comme toujours, le public goûte l’art (diction, musicalité) en silence, et se réveille quand il est secoué par un phénomène, comme le baryton français Alexandre Duhamel, qui ouvre les vannes dans Don Quichotte de Massenet, ou le ténor argentin Manuel Nunez Camelino, lancé à fond de train dans les contre ut à répétition de La Fille du Régiment de Donizetti. Le plus troublant, c’est que parmi ces jeunes qui chantent dans la salle des grands, les graines de stars sont indétectables. Tous ont leur chance, ou aucun. Quel métier !

vendredi 26 février 2010

Carmen, suite et peut-être pas fin

Encore Carmen ? Oui, mais pas n’importe laquelle, celle dont l’Opéra de Paris ne s’est jamais remise, celle « de » Raymond Rouleau, donnée au Palais Garnier du 10 novembre 1959 au 14 juillet 1970. Un site lui est consacré, préfigurant la sortie d’une monographie consacrée à l’événement, et ne nous laissant rien ignorer des distributions qui ont succédé à celle, très médiatique, de la première (Jane Rhodes sous la direction de son époux Roberto Benzi), ni du buzz, comme on dit aujourd’hui, suscité par le spectacle. Un extrait du papier de Denise Bourdet (l’épouse du dramaturge Edouard Bourdet, l’auteur du Sexe faible) dans Le Figaro littéraire suffit à rappeler que Raymond Rouleau n’avait rien à envier à Luchino Visconti, avec lequel il partageait la scénographe Lila de Nobili : " Le cortège entre dans les arènes, la foule le suit, et sur la scène désertée on aperçoit un groupe de mendiants accroupis contre un mur dont ils ont la couleur et l'immobilité de pierre. Ils restent là sans bouger pendant la scène finale, et ce n'est que sur le dernier cri de don José, Oh ma Carmen adorée, qu'ils se redressent silencieusement et se retournent pour regarder le meurtrier tandis que le rideau tombe."

Après cela, en 1980, l’opéra le plus joué au monde retournera à l’Opéra-Comique pour quelques représentations avec Teresa Berganza et Plácido Domingo, puis connaîtra à l’Opéra Bastille deux productions qui n’ajouteront rien à sa gloire. En 1990, quand Grace Bumbry, qui a chanté le rôle à Garnier et a alterné avec Jane Rhodes lors d’une tournée du spectacle au Japon, viendra essuyer les plâtres de l’Opéra Bastille dans Les Troyens de Berlioz, elle n’aura de cesse de trouver en vidéo le film de Jacques Becker Falbalas, où Rouleau joue un couturier bourreau des cœurs, et le programme de Dialogues d’exilés de Bertolt Brecht, le dernier spectacle joué à Paris pas l’acteur-metteur en scène. Elle garde un souvenir ébloui de celui qui, tel un Maurice Pialat du théâtre, aimait tant faire pleurer les actrices.

mercredi 24 février 2010

L’autre Dumas. Et si Depardieu était chanteur d’opéra ?


Ici, la polémique Dumas-Depardieu fait rage. En Amérique, où Depardiou est une star, elle étonne. Puisqu’aucun acteur français de couleur n’est bankable, pourquoi se priver d’une tête d’affiche ? On ne saurait être plus pragmatique. Et d’ailleurs, si le rôle avait échu à un acteur blanc mais moins connu, la polémique aurait-elle eu lieu ? Francis Perrin a joué pendant deux ans la pièce dont le film est tiré, et personne n’y a rien trouvé à redire. Ce qu’on remarque moins, c’est qu’au nom des grands principes, on en vient à nier l’art même de l’acteur, qui consiste justement à amener le spectateur à croire qu’il est ce qu’il n’est pas. Imaginez le monde de l’opéra saisi par la même bien-pensance. Plus d’Aida blanche passée au brou de noix, telle Sophia Loren (doublée par Renata Tebaldi) dans le film de Clemente Fracassi (1953). Et ne parlons même pas d’Otello, bien que l’Opéra de Birmingham ait, à l’automne dernier, fondé sa publicité sur le fait que, pour la première fois au Royaume-Uni, le rôle du Maure était chanté par un vrai noir ! On se rappelle les propos persifleurs de Franco Zeffirelli au sortir de la projection de La Bohème de Luigi Comencini (1988), avec Barbara Hendricks en Mimi. Daniel Toscan du Plantier, le producteur du film, avait pris la peine d’expliquer qu’au XIXème siècle, quelques filles des îles venaient tenter leur chance en métropole, mais la majorité des commentateurs avait renvoyé Zeffirelli à ses chères études. On ne sait pas, en revanche, si celui-ci s’était fendu d’une plaisanterie politiquement incorrecte lorsque la soprano afro-américaine Martina Arroyo avait chanté Madame Butterfly au MET de New York (1970), avec kimono à fleurs et aiguilles à tricoter dans les cheveux. Au début des années 1980, le baryton-basse Simon Estes s’était vu refusé le rôle de Wotan à Bayreuth parce qu’il était noir. Il avait en revanche eu le droit d’y chanter le Hollandais du Vaisseau fantôme, sans doute parce qu’il s’agit d’un damné. Là, oui, on peut parler de racisme. Mais aujourd’hui, le Jamaïcain Willard White est acclamé en roi des dieux nordiques, et personne ne s’est offert le ridicule de lui reprocher de voler le rôle à un grand blond.

Scorsese + Di Caprio + Ligeti + Penderecki = Shutter Island


Si l’on vous dit : Symphonie n°3 de Penderecki, Lontano de Ligeti, Uaxuctum de Scelsi, Christian Zeal And Activity de John Adams, Music for Marcel Duchamp de John Cage, ou Rothko Chapel de Morton Feldman, vous répondez : « programme du prochain festival Musica à Strasbourg ». Vous vous trompez : il s’agit de la bande originale de Shutter Island, le nouveau film de Martin Scorsese qui sort aujourd’hui en France. Il faut être le réalisateur de Taxi Driver et d’Aviator pour faire accepter une telle affiche à des producteurs en général plus sensibles à John Williams ou John Barry. Le sujet de Shutter Island se prête, il est vrai, à un contrepoint musical dérangeant, puisqu’il s’agit d’une enquête de police (inspecteur : Leonardo Di Caprio) dans un hôpital-prison (directeur : Ben Kingsley) réservé aux fous dangereux. Le réalisateur a fait confiance à Robbie Robertson, son conseiller musical attitré, l’homme qui a eu, en 1980, l’idée lumineuse d’accompagner du très sentimental Interlude de Cavalleria Rusticana de Mascagni les coups de poings du boxeur La Motta dans Raging Bull. Scorcese donne à Shutter Island des parrains de poids. Pour les images, il se réclame d’Orson Welles - en particulier du Procès, d’après Kafka, tourné en 1962 à la Gare d’Orsay -, et pour le son, de Stanley Kubrick, qui a, dans The Shining, fait de Ligeti et Penderecki des compositeurs à ne pas écouter la nuit. Pas la peine d’espérer que la bande originale battra celle d’Avatar : Paramount a retardé la sortie du film dans l’espoir que la conjoncture de 2010 serait plus favorable que celle de 2009 à l’exploitation d’un film destiné à un public adulte, c'est-à-dire moins enclin à aller au cinéma que les ados chéris des producteurs.


Shutter Island, de Martin Scorsese. Sortie en France le 24 février

mardi 23 février 2010

A Baltimore, la chef Marin Alsop dérouille les musiciens rouillés


Des musiciens amateurs dans un orchestre symphonique : cacophonie assurée ? Pas si l’on en croit l’expérience tentée à Baltimore (Etats-Unis) par « la » chef Marin Alsop. Vingt-quatre heures après l’ouverture des inscriptions, quatre-cents postulants des tous âges et de toutes conditions s’étaient présentés pour participer à l’opération Rusty Musicians (musiciens rouillés), stipulant que toute personne de plus de vingt-cinq ans sachant lire la musique et ayant appris à jouer d’un instrument était la bienvenue. Au programme : le finale de la Quatrième Symphonie de Tchaïkovski et Niemrod, la plus célèbre des Variations « Enigma » d’Elgar. En pratique : huit concerts (10 dollars la place) avec huit groupes différents, encadrés par les musiciens de l’orchestre symphonique de Baltimore. Résultat encourageant, voire inespéré. La plupart des participants jouent régulièrement dans des ensembles amateurs, et bon nombre d’entre ont été un jour tentés par la vie d’artiste.
L’expérience a été tellement concluante qu’une académie d’orchestre aura lieu en juin (coût de l’inscription : 1650 dollars), avec master-classes, conférences et concerts dirigés par maestra Alsop. Le but de l’opération ? Faire venir un nouveau public, bien sûr. Une statistique indique que 70% des abonnées du Baltimore Symphony jouent ou ont joué d’un instrument. Et pourtant, bien peu des quatre-cents participants à Rusty Musicians font partie du public régulier de l’orchestre. Le monde est coupé en deux : il y a ceux qui regardent le sport à la télévision et ceux qui descendent sur le terrain. En France, où la pratique amateur est moins systématique que dans les pays anglo-saxons, de timides rapprochements ont été tentés entre ensembles amateurs et professionnels. Quelle Marin Alsop viendra secouer nos habitudes ?

Crédit photo : Grant Leighton

lundi 22 février 2010

Moozar au pays du Téléthon

Le mois dernier, Frédéric Mitterrand a annoncé le projet « carte jeune » : 200 euros de potentiel d’achat de musique en ligne à moitié remboursés par l’état. Voici maintenant Moozar, ou la possibilité de dédommager les artistes dont on a piraté les disques sur Internet. Au pays du Téléthon, on compte décidément sur le bon cœur du consommateur. Moozar, c’est une start-up créée par le juriste David Brami. Le Monde.fr, qui lui consacre un article, qualifie l’entreprise d’utopie libérale, ou encore d’alternative à l’usine à gaz Hadopi. On paie (un euro, ou plus, si l’on veut), mais après coup : il ne s’agit plus d’acheter un produit, mais de remercier l’artiste du plaisir qu’il nous a procuré. La nuance est élégante. Brami invoque la conscience des internautes, assure que si 95% d’entre eux sont des prédateurs, ils sont 60% à souhaiter réparer leur faute. Quand le législateur patauge, l’imagination prend le pouvoir. Bonne idée, en plus, d’appeler cela Moozar. Wolfgang Amadeus, en termes d’image, est la conscience de la musique. De toute façon, le classique n’est pas concerné, ou si peu. Car pour recevoir les dons (c’est le mot employé) des internautes repentants, il faudrait que Mozart, ou ses actuels interprètes, soient inscrits à Moozar.

dimanche 21 février 2010

Bartok digital : si Bela avait su ça !

Si Bela Bartok avait su, il y aurait mis encore plus d’énergie : les tonnes de documents et enregistrements qu’il a recensés pour que la musique traditionnelle - c'est-à-dire non écrite - de son pays ne tombe pas dans l’oubli sont désormais en ligne, sur le site de l’Institut de musicologie de l’Académie des Sciences de Hongrie. A moins d’être musicologue, direz-vous, pas besoin de connaître tout cela pour apprécier le compositeur, ni même pour détecter les traces de folklore hongrois dans Le Château de Barbe-Bleue. Certes, mais à l’heure où tout et n’importe quoi est conservé, archivé, protégé, pérennisé, digitalisé, MP3isé, ce travail acharné de sauvegarde d’un patrimoine en danger méritait bien cela. « A quoi sert d’apprendre, puisque tout est dans les livres ? » se demandait l’ancien cancre Sacha Guitry. A ne pas oublier, par exemple, qu’un Bartok a sué sang et eau sur les chemins des Carpates, et qu’il en a rapporté des trésors.

samedi 20 février 2010

Andrew Lloyd Webber et Paul McCartney au secours d’Abbey Road

Il manquait un symbole de la crise du disque. La mise en vente des studios londoniens d’Abbey Road, effet immédiat de la déconfiture d’EMI qui avait acheté le terrain pour 100 000 livres sterling en 1929, vient, si l’on ose dire, à point. Premier appel à la résistance : celui de Paul McCartney, quarante-et-un ans après l’album justement intitulé Abbey Road, sur la pochette duquel on voyait les Beatles traverser … Abbey Road.  Andrew Lloyd Webber lui a emboîté le pas, parlant même de racheter les bâtiments, sachant qu’EMI a déjà refusé une offre de 30 millions de livres. Première question angoissée : que vont devenir lesdits bâtiments  ? Dans son blog, la romancière Jessica Duchen imagine un hôtel de luxe, avec Suite Elgar (en souvenir de Yehudi Menuhin enregistrant là le Concerto pour violon sous la baguette du compositeur) et jacuzzi Beatles. Elle rêve aussi d’un musée de la musique, où l’on verrait qu’avant que le numérique ne vienne tout changer, la réalisation d’un disque nécessitait une énorme infrastructure.  On y verrait des photos d’un autre siècle, quand le directeur artistique Walther Legge invitait le vétéran Furtwängler et le débutant Giulini à enregistrer les chefs-d’œuvre du répertoire avec le Philharmonia, l’orchestre de luxe qu’il avait créé tout exprès pour eux. On y évoquerait Thomas Beecham (1m85), chef et milliardaire (les petites pilules Beecham, c’était sa famille), apprenant que le jeune Herbert von Karajan (1m68) s’apprêtait à enregistrer Hänsel et Gretel d’Humperdinck, et lui demandant : « Hänsel et Gretel ? Les deux à la fois ? ». Plusieurs centaines de touristes venaient chaque jour devant l’entrée des studios et écrivaient sur le mur des déclarations d’amour aux artistes de leurs rêves. Mais le pèlerinage était gratuit, et les notes de chauffage exorbitantes. La nouvelle est tombée le jour même où l’on apprenait la mort de Michel Glotz, qui fut trente ans durant le directeur artistique de Karajan. Comme le chantait Bob Dylan (artiste Columbia, concurrent d’EMI)  : “The times, they are a-changin”.

vendredi 19 février 2010

Stephen Sondheim, l’aristocrate de la comédie musicale au Châtelet

Sous-genre : « section établie dans un genre et renfermant une ou plusieurs espèces », explique le Littré. Ceci pour la biologie. Quand il s’agit d’art ou de littérature, le terme prend une connotation péjorative. L’opérette, par exemple, ou sa fille la comédie musicale, sont des sous-genres de l’opéra. Les enfilades de chansons interprétées et mises en scène façon Star Ac’ dont les Français se délectent depuis Notre-Dame de Paris relèvent, en effet, de ce genre d’en-dessous. Mais comment appeler alors A Little Night Music, de Stephen Sondheim, que l’on connaît ici pour être le troisième homme de West Side Story, aux côtés de Leonard Bernstein et Jerome Robbins ?
« A musical », dit-on à Broadway, où Sondheim, longtemps boudé pour son intellectualisme, est aujourd’hui considéré comme un maître. Soit. Il se démarque en tout cas, pour la musique comme pour les histoires qu’il raconte, d’un Andrew Lloyd-Weber, roi du musical sirupeux (mais efficace) importé de Londres. Cette Petite Musique de nuit, inspirée du film d’Ingmar Bergman Sourires d’une nuit d’été, est même à l’opposé de la mélodie continue selon Lloyd-Weber. Ici, la musique naît du théâtre, les mots et les notes se rencontrent, se quittent, se retrouvent, comme ces couples assortis pour le pire qui vont se reformer pour le meilleur au cours d’une nuit légère et profonde. « Je n’avais jamais entendu ma musique par un orchestre au grand complet », s’est étonné Sondheim, habitué aux petits ensembles de Broadway, où A Little Night Music est actuellement à l’affiche avec Catherine Zeta-Jones et Angela Lansbury. Au Châtelet, le metteur en scène anglais Lee Blakeley manie le grand spectacle, mais tout est d’une grâce, d’une fluidité étonnantes. Quand Leslie Caron entre en valsant et s’immobilise, soudain âgée mais étonnamment juvénile, sur la chaise roulante d’où elle va observer les chassés croisés de cette nuit d’été, on a l’impression de parcourir le demi-siècle qui nous sépare d’Un Américain à Paris, où elle virevoltait en compagnie de Gene Kelly. Et là, un frisson de bonheur parcourt le public.

A Little Night Music, de Stephen Sondheim. Avec Leslie Caron, Greta Scacchi, Lambert Wilson. Orchestre Philharmonique de Radio France, Jonathan Stockhammer (direction) – Châtelet, les 19 et 20 février à 20h.

jeudi 18 février 2010

Sibelius, sympathisant nazi ?

Aux Etats-Unis, la chasse aux sorcières ne sera jamais finie. Voilà que dans Sibelius dans l'Ancien et du Nouveau Monde: Aspects de sa musique, son interprétation, sa réception, un livre qu’il cosigne avec trois de ses collègues, un professeur à l’University of Nord Texas, Timothy L. Jackson, accuse formellement Sibelius de sympathie avec les nazis. Il n’est pas le premier à le faire, mais il avance des arguments chocs : acceptation en 1935 de la Médaille Goethe avec signature d’Hitler à l’appui, pension allemande octroyée à partir de 1941, approbation par le Troisième Reich de la Société Sibelius en Allemagne, interview complaisante donnée à un reporter de guerre SS, refus d’honorer la promesse, faite avant la guerre, d’aider un jeune compositeur juif. Avant même qu’il ne paraisse, le livre provoque une levée de boucliers. « Gardez à l'esprit que nous parlons d'un vieil homme chauve aux mains tremblantes, avec une cataracte à l'œil et qui, probablement, ne savait même pas que les SS existaient », rappelle Vesa Siren, gardien du temple Sibelius en Finlande. Sur la toile, le buzz fait rage : coupable ou non coupable, le champion du nationalisme finlandais, le créateur d’une musique inclassable glorifiant la terre de ses ancêtres et les hauts faits des défenseurs de la patrie ? Quoi qu’il en soit, on risque de ne plus arriver à écouter innocemment Finlandia ou Le Cygne de Tuonela. Comme chez Wagner, comme chez Richard Strauss, on cherchera des signes. Quels signes, et des signes de quoi ? Un unisson de cuivre trop péremptoire, une évocation trop complaisamment nostalgique du folklore nordique, un accord un peu brusque, voire totalitaire ? On risquera d’oublier que lorsqu’Hitler accède au pouvoir, Sibelius est déjà muré dans un silence qui durera jusqu’à sa mort ; que pour recréer de toutes pièces un pays longtemps rayé de la carte, un certain nationalisme se justifie ; qu’aucune musique n’est un appel au meurtre, comme ont pu l’être les pamphlets de Céline, et que c’est par ses écrits (livrets d’opéras compris) et non par sa musique que Wagner véhicule des idées malodorantes ; et enfin que si René Leibowitz, le champion de Schoenberg et du dodécaphonisme, a traité Sibelius de « plus mauvais compositeur du monde », Lucien Rebatet, rédacteur à Je suis partout, l’a défini comme « le plus ennuyeux des musiciens sérieux ». Les extrêmes renvoyés dos à dos. Et si la question demeure, lancinante, on se rappellera la phrase de Proust dans Contre Sainte-Beuve : « L’homme qui fait des vers et qui cause dans un salon n’est pas la même personne ».

mercredi 17 février 2010

Le déclin des orchestres américains : la faute aux baby-boomers

Graphique douloureux publié par la Ligue des orchestres américains, dans son Audience Demographic Research Review (étude démographique du public). On y lit – ce qu’on savait déjà - que c’est à l’âge mûr que les gens (enfin, des gens) délaissent les Rolling Stones pour se tourner vers Brahms. On y lit aussi que ce sont les baby-boomers qui ont commencé à exclure la musique classique de la culture générale. Détail inquiétant : la génération appelée « X », celle des actuels quadragénaires, tarde dangereusement à découvrir Brahms. Normal : les baby-boomers n’ont pas transmis à leurs enfants une culture qu’ils ont eux-mêmes jetée aux orties. Cela, on ne l’a pas remarqué tout de suite, parce que les baby-boomers (enfin, ceux qui étaient encore mélomanes) ont contribué par leur nombre à booster les statistiques. Comme le remarque Alex Ross, le critique musical du New Yorker, sur son blog Unquiet Thoughts, rien n’est perdu, puisque en Amérique comme en Europe, les conservatoires refusent du monde, et que des programmes d’initiation à la musique fleurissent un peu partout. Ce qui est urgent, c’est, en attendant, de convaincre la génération X qu’elle vivrait mieux avec Brahms que sans. En France, où l’honnête homme se doit de connaître La Princesse de Clèves sur le bout des doigts mais n’est pas tenu de savoir que Beethoven a composé neuf symphonies, le problème n’est pas moins aigu. Mais là non plus, rien n’est perdu : on construit bien une grande salle de concerts au bord du périphérique parisien.

mardi 16 février 2010

Prokofiev, dernières miettes du gâteau

Le 9 février, le pianiste russe Boris Berman, interprète d’une intégrale Prokofiev (Chandos) et d’un livre sur les Sonates de Prokofiev (Yale University Press), joue Prokofiev au Zankel Hall de New York. Rien que de normal, sauf qu’il s’agit cette fois d’œuvres récemment retrouvées de l’auteur de Pierre et le Loup. Il y a la Musique pour les athlètes, composée en 1939 pour un spectacle gymnique devant rassembler 30 000 jeunes, mais qui n’a pas eu lieu parce que le metteur en scène, le grand Vsevolod Meyerhold, a été arrêté par la police de Staline. Il y a deux mouvements rescapés du ballet Trapèze (1924), jamais joué, et dont Prokofiev a récupéré la musique dans le Quintet op. 39 et le Divertimento op. 43. Il y a aussi des fragments de l’opéra Mers lointaines, laissé inachevé en 1948. Musiques perdues, ou abandonnées en route, ce qui n’est pas la même chose, sauf si l’on est fataliste, et que l’on est persuadé que ne se perd que ce qui doit se perdre. On pense en tout cas à ces fragments de poteries retrouvées dans un champ de fouilles, et qui permettent aux archéologues de reconstituer la maison tout entière. Sauf qu’en musique, les fragments sont trompeurs, et restent mystérieux quant aux intentions de l’auteur. Les œuvres terminées après coup (Turandot de Puccini, Lulu de Berg, la Symphonie inachevée de Schubert, la 10ème Symphonie de Mahler) le montrent bien : après avoir été inachevées, elles sont devenues bancales. Notre époque s’est fait une raison, et pratique le culte du fragment : on aime les derniers tableaux de Turner parce qu’ils ne sont pas finis, on est d’autant plus touché par Le premier Homme et Le dernier Nabab que Camus et Fitzgerald n’ont pas eu le temps de les terminer, on glose sur le fait que Debussy a qualifié La Mer d’ « esquisses symphoniques ». En attendant, elle est très amusante, cette Musique pour les athlètes, que Prokofiev a composée dans le style réaliste-socialiste-accessible-aux-masses, dont le ballet Roméo et Juliette est le chef-d’œuvre. Et puis, au fait, elle est terminée, elle.

lundi 15 février 2010

EMI en danger : faut-il classer Callas et Karajan ?

Rumeurs alarmistes à propos d’EMI, la seule major phonographique à ne pas avoir encore été absorbée par un grand groupe audiovisuel, tel Universal ou Sony. 1 milliard 750 millions de livres sterling (2 014 600 000 euros) de dettes pour l’année passée, bagarre sanglante entre financiers, lutte à mort entre Londres et New York. Si le groupe américain Citygroup (une des plus grosses, sinon la plus grosse des entreprises financières mondiales) l’emporte, c’en est fait de l’exception culturelle britannique appelée EMI. Levers de bouclier dans la presse et sur le Net. Le blog anglais On an overgrown path (Sur un sentier herbeux, titre d’une œuvre de Janacek), suggère que l’UNESCO étende sa protection du Patrimoine de l’humanité aux monuments intellectuels, et fasse classer les enregistrements des Pink Floyd et de Jacqueline Du Pré au même titre que les mégalithes de Stonehenge ou la cathédrale de Cantorbéry. Le traumatisme de la crise est décidément bien ancré : banquiers = prédateurs, libéralisme = destruction du bien commun au profit de quelques-uns, ces quelques-uns étant davantage enclins à encaisser des bonus qu’à protéger la culture. Il est en effet vraisemblable que les croqueurs de dollars de Citygroup (ou d’un autre monstre financier) ne tiendront pas le patrimoine laissé par Maria Callas pour une source de profit digne d’intérêt. A moins, peut-être, que Casta Diva ne vienne optimiser un spot de publicité. On va finir par bénir le domaine public : réédités par qui le veut, les disques signés Callas, Du Pré ou Karajan ont, au moins, une chance de survivre.

dimanche 14 février 2010

L’iVictrola : l'iPhone de grand papa

La caméra enveloppe amoureusement un pavillon acoustique façon gramophone. Musique d’ambiance, lointaine. Une main masculine entre dans le champ et introduit un iPhone dans le réceptacle pratiqué à cet effet sur le socle en bois clair (chutes de noyer) du pavillon. Musique plus forte. Plan fixe du dispositif. Nom de l’appareil : le iVictrola (référence à l’invention de la Victor Machine Talking Company – 1901-1929), œuvre du designer Matt Richmond. Amplification acoustique ne nécessitant aucune installation électrique : écologique et élégant (pas de fil). Très chic dans une résidence secondaire avec poutres en polyurétane haute densité et cheminée à effet feu de bois. Trouve naturellement sa place auprès d’un téléphone en bois et cuivre, avec clavier digital dissimulé sous cadran d’époque amovible. Commentaire d’un internaute : « Peuh ! Déjà vu il y a deux jours sur … » C’est dire qu’on n’est pas près de trouver ce chef-d’oeuvre dans les brocantes et vide-greniers. En attendant, il coûte 425 dollars (295 euros, profitez du change, s’il en est encore temps). Mais il faut être patient : il est déjà en rupture de stock.

samedi 13 février 2010

Avec Irina Arkhipova, c’est toute une époque qui s’en va


Au temps de l’URSS, les disques Melodyia (label officiel et unique, comme Mosfilm pour le cinéma) avaient deux caractéristiques : l’encre de leur pochette sentait mauvais et le prénom des interprètes n’était indiqué que par leur initiale. C’est ainsi que Boris Godounov par le Bolchoï de Moscou (version officielle aussi, d’ailleurs recommandée par les critiques occidentaux) était chanté par I. Petrov et I. Arkhipova. Invitée à Paris avec le Bolchoï au grand complet en 1969, I. devint Irina, et fit un tabac. On la revit en 1972 aux Chorégies d’Orange, dans un Trouvère de Verdi où elle ravalait sa partenaire Montserrat Caballé au rang des petite voix. Quel organe elle avait, cette Artiste du peuple à qui le ministère de la Culture soviétique ne refusait jamais un visa pour l’étranger (il y avait des gens, à l’époque, pour prétendre qu’elle notait les faits et gestes de ses collègues en tournée avec elle, mais on disait cela de tous les artistes autorisés à passer le rideau de fer) ! En dehors du répertoire russe, où les mezzos à large vibrato sont bien servis, c’est Carmen qui était - si l’on ose dire - son cheval de bataille.

Il existe chez Melodiya un enregistrement live du Bolchoï où elle a pour partenaire le bouillant Mario Del Monaco (en représentation, comme on disait à l’époque), lequel, alors que le reste de la troupe chante en russe, claironne Don José en italien, avec des passages en français, sans doute pour faire « version originale ». A l’’époque, cela ne dérangeait pas : quand I(van) Petrov est venu chanter Boris au Palais Garnier en 1954, il était le seul à s’exprimer en VO. Irina Arkhipova, qui occupait sa retraite à la gestion d’une Fondation destinée à soutenir les jeunes chanteurs d’opéra, est morte à Moscou jeudi 11 février, d’une insuffisance cardiaque. Elle avait quatre-vingt-cinq ans. Ecoutez-la dans le Boris Godounov déjà cité (dirigé par le grand chef Alexandre Melik-Pachaiev), dans La Khovantschina (direction : le non moins grand Boris Khaikine), ou dans Guerre et Paix de Prokofiev, où elle chante le rôle d’Hélène Bezoukhov, qu’elle avait créé au Bolchoï en 1959. En 1992, on l’avait encore vue en Nourrice d’Eugène Onéguine au Châtelet. Un tout petit rôle. Aux saluts, les fleurs pleuvaient sur elle.

vendredi 12 février 2010

Stephen Hough ou la gaytitude du pianiste

Message sur le site du pianiste anglais Stephen Hough : « En écoutant votre enregistrement des deux Valses énigmatiques dont vous êtes l’auteur, le terme homosexualité m’est venu à l’esprit ». Hough, qui est gay et ne s’en cache pas, répond en citant la boutade de Vladimir Horowitz : « Il y a trois sortes de pianistes : les juifs, les homosexuels et les mauvais ». Il se demande ensuite s’il est possible d’opposer des pianistes comme Horowitz, Sviatoslav Richter et Shura Cherkassky à Arthur Rubinstein, Emil Guilels et Rudolf Serkin, les trois premiers, bien que mariés, n’ayant pas la réputation d’avoir été des hommes à femmes. Il ne va pas, en revanche, jusqu’à se demander si la judéité d’Horowitz ou de Rubinstein s’entend dans leur manière de jouer les Mazurkas de Chopin, ni, a fortiori, si aucun de ces géants du clavier a réuni les trois particularités. Dans les cent-cinquante-trois commentaires qu’a jusqu’ici suscités l’article de Hough, les internautes se déchaînent. On se pose des questions sur le lesbianisme présumé de Dame Myra Hess (1890-1965), on disserte sur la masculinité latente de Martha Argerich, on cite Oscar Wilde, et l’on remarque que dans son film Richter l’insoumis, Bruno Monsaingeon évite de préciser les préférences sexuelles de l’artiste. Tout cela fait froid dans le dos, non ? Par bonheur, personne n’a relevé que c’est en jouant ses propres œuvres que Hough a mis la puce à l’oreille de son sagace auditeur. On échappe ainsi aux considérations sur l’homosexualité coupable qui irrigue la Symphonie « Pathétique » de Tchaikovski ou la gaytitude transcendée de Szymanowski dans Le Roi Roger. Dans Contre Sainte-Beuve, Marcel Proust, conteste l’idée que l’œuvre est le reflet de la vie : « L'homme qui fait des vers et qui cause dans un salon n'est pas la même personne », affirme-t-il. Mais chacun sait que Proust était juif et homosexuel.

Crédit Photo: Eric Richmond

jeudi 11 février 2010

Le Festival de Pâques de Salzbourg : prends l'oseille et tire-toi !


Côté salle, le Festival de Pâques de Salzbourg est un rêve de milliardaire : des places à 1250 euros, le Philharmonique de Berlin dans la fosse, des spectacles grand-luxe dans la tradition instaurée par Hebert von Karajan, qui l’a créé en 1967. Côté coulisses, un thriller dur, façon Millénium. La semaine dernière, Klaus Kretschmer, le directeur technique, est découvert sous un pont, grièvement blessé. Il était suspecté d’avoir empoché 700 000 euros destinés à des cabinets de conseil. « C’est Michael Dewitte le responsable, avait-il déclaré, moi, je ne suis que la victime d’un dommage collatéral ». Michael Dewitte, directeur général du festival, est actuellement en fuite. Il aurait, lui, détourné 5% du budget global durant les huit dernières années, ponctionné les dons des sponsors, trafiqué les notes de frais, procuré un emploi fictif à son épouse, siphonné 300 000 euros versés sur un compte bancaire chypriote. Les cabinets d’audit Deloitte et Ernst&Young, chargés chaque année de vérifier les comptes du festival, n’avaient rien remarqué, jusqu’à ce que la direction fasse procéder à une enquête spéciale, chargée d’expliquer où étaient passés les deux millions d’euros manquant dans les caisses. Actuellement, huit têtes du Festival de Pâques sont en examen, et ce n’est peut-être pas fini, car le Festival d’Eté risque, lui aussi, d’être gangréné : « C'est comme les bombardements américains sur Belgrade, ironise Ioan Holender, le directeur de l'Opéra de Vienne, dont Salzbourg est presque la résidence estivale. Ils ont appelé cela des dommages collatéraux. Les deux festivals sont dans le même immeuble et ont la même infrastructure. Avec la meilleure volonté du monde, ils ne peuvent pas être séparés ».
Revenons côté salle. Le 27 mars, Simon Rattle, successeur de Karajan à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Berlin, dirige au Grand Festspielhaus Le Crépuscule des dieux de Wagner, dans la mise en scène de Stéphane Braunsweig, créée à Aix-en-Provence l’été dernier. Que raconte Le Crépuscule des dieux ? La fin d’un monde d’envie et de profit, et l’avènement d’une nouvelle ère. Karajan, qui avait créé le festival de Pâques pour y monter Wagner à sa façon et concurrencer celui de Bayreuth, n’aurait pas manqué de faire remarquer que, comme d’habitude, il avait tout prévu avant tout le monde. Aux dernières nouvelles, c’est Peter Alward, ancien directeur d’EMI Classics, qui occupera dès la semaine prochaine le fauteuil laissé vide par Michael Dewitte. « Je le connais depuis trente ans, a déclaré Eliette von Karajan, la veuve du maestro. Il est digne de confiance ». C’est tout dire !

mercredi 10 février 2010

Christoph Schlingensief construit un opéra à Ouagadougou

Un Opéra au Burkina Faso. Un caprice colonialiste, comme celui de Manaus, dans la forêt brésilienne ? « Pas du tout, se défend Christoph Schlingensief, le metteur en scène et cinéaste allemand qui réalise là son rêve. Nous n’avons rien à apprendre aux Africains, mais beaucoup à apprendre d’eux. Le festival qui aura lieu tous les ans ne sera pas une copie de Bayreuth. Il mobilisera les énergies culturelles autochtones ». Curieux personnage que ce Schlingensief, réalisateur d’une trilogie filmée sur l’Allemagne (Les dernières heures du Führer dans le bunker ; Massacre allemand à la tronçonneuse ; Allemagne, bloc de réanimation), et metteur en scène d’un Parsifal dirigé par Pierre Boulez à Bayreuth en 2004, qui ont fait de lui un génie pour les uns, un imposteur pour les autres, pour tous un virtuose de la provocation. Arte lui a consacré une émission en septembre dernier, où on le voyait chercher le lieu idéal pour réaliser ce projet qu’il s’est juré de mener à bien il y a deux ans, après avoir été opéré d’un cancer du poumon. Dans un village de la périphérie de Ouagadougou, la première pierre a été posée le 8 février, et treize containers de matériel sont arrivés d’Europe. Le bâtiment, dessiné par Francis Ker, un Burkinabé résidant à Berlin, sera une spirale de béton, il comprendra des salles de spectacle, des ateliers, une école de musique et de cinéma, et même un dispensaire. Le Goethe-Institut, le ministère allemand des Affaires étrangères et la Fondation Culturelle Fédérale participent au financement. Ce qu’on ne connait pas encore, c’est le programme de l’inauguration, prévue en octobre, de ce « Village africain d’opéra ». S’il s’agit d’un spectacle monté par Schlingensief lui-même, le public local risque de se faire une curieuse idée d’une culture si longtemps considérée comme dominante.

mardi 9 février 2010

Pendant les Victoires de la musique, Alain Planès joue Chopin. Ailleurs.

Qu’y a-t-il en dehors des Victoires de la Musique, les soirs de Victoires de la Musique ? Eh bien, des concerts, c'est-à-dire des manifestations qui n’ont pas grand-chose à voir avec les Victoire de la Musique. Au Corum de Montpellier, où les Victoires ont lieu cette année, l’atmosphère est à la fête. Gérard Pangon a l’œil sur son poste de télévision :
« Les Victoires de la Musique classique, c'est comme les Césars ou les Molières : chaque année, on se persuade ça ne vaut la peine de gâcher sa soirée, que les slurps et les bisous vont dégouliner, que les plus insipides vont se prendre pour Brad Pitt, les plus ternes se déguiser en Castafiore et les plus niais se croire aussi malins que Jean-Luc Godard. Mais chaque année, on finit quand même devant sa télé, juste pour voir comment ça se présente. Et trois heures plus tard, sans avoir bougé, on se dit : « L'année prochaine, on ne m'y reprendra plus. » Seulement voilà : cette fois-ci, il y a eu un truc. D'abord un programme aux petits oignons : danses polovtsiennes pour commencer, puis Hélène Grimaud dans le Concerto en sol de Ravel, Vadim Repin dans Brahms, Vivica Genaux triomphante même si les gros plans ne l'arrangent pas, Hervé Niquet parfait dans un rôle de faire valoir avec Shirley et Dino, un trio harpe, scie musicale et cor des Alpes qui arrive au bon moment, Alexandre Tharaud magnifique dans un Nocturne de Chopin. Un vrai rythme, des éclairages qui évitent le côté supermarché, une réalisation qui suit la musique... de quoi montrer que le classique n'est pas une affaire de vieux, ni de ringards, ni de refoulés. Mieux : on a oublié les commentaires de Frédéric Lodéon, qui n'a pourtant pas ménagé sa peine : « Philippe Jarrousky est un contre-ténor, pas un castrat : il le précise toujours, pas besoin d'aller vérifier. » ou bien « Chabrier le bon gros Auvergnat, compositeur néanmoins. » Quant au palmarès, c'est une autre histoire... »
Pendant ce temps-là, aux Bouffes du Nord transformé en cirque pour le spectacle de Joël Pommerat Cercles-fictions, Alain Planès joue sur instrument d’époque le programme du récital donné par Chopin dans les salons Pleyel le 21 février 1842. La salle est bondée, le public plus jeune, plus théâtre que celui des circuits traditionnels. Le piano Pleyel (1836) nous emmène lui aussi ailleurs, loin de la tradition du vite et fort. Planès enchaîne Nocturnes, Préludes, Etudes et Mazurkas avec délié, comme un monologue à mi-voix. On se fait à ce son boisé, à cette disparité entre le grave et l’aigu, à ces touches qui n’obéissent pas au doigt et à l’œil. Un régal pour initiés, diront les fidèles des Victoires. Déjà à l’époque, Berlioz reprochait à Chopin de jouer trop doucement, et Liszt s’amusait à imiter le toucher aérien de ce confrère qui était son contraire. Berlioz et Liszt auraient participé aux fastes télévisuels de Montpellier. Chopin, lui, aurait joué pour ses amis. Liszt a été le premier biographe de Chopin. Les contraires s’attirent.

Chopin chez Pleyel. Alain Planès (piano Pleyel, 1836). 1 CD Harmonia Mundi.

lundi 8 février 2010

Fabio Luisi quitte Dresde : Orchestre, ton univers impitoyable…

Rude métier que celui de chef d’orchestre. Prenez le Génois Fabio Luisi, directeur de l’Opéra et de la Staatskapelle de Dresde depuis 2007. Au détour d’une conversation, il apprend qu’un grand concert festif est prévu pour la St Sylvestre 2010. « Vous auriez pu me prévenir », rétorque-t-il. « Ce n’est pas vous qui le dirigerez, mais Christian Thielemann ». Scandale, démission. Renseignements pris, il découvre qu’un contrat a été passé avec la chaîne de télévision ZDF pour faire mousser l’événement : Thielemann est une star, il enregistre chez Deutsche Grammophon, il est le plus allemand des chefs allemands (certains nostalgiques le comparent à Furtwängler), et de toute façon, il devait succéder à Luisi à Dresde en 2012, lui-même ayant claqué la porte du Philharmonique de Munich pour de sombres raisons politico-contractuelles. Le procédé est international : on se souvient de la rage de Christoph Eschenbach quand il a appris qu’il n’était pas reconduit à la direction de l’Orchestre de Paris et que Paavo Järvi (lui-même cumulard de haut vol) avait été nommé derrière son dos au poste qu’il aurait bien voulu conserver.
En attendant, Luisi étant parti et Thielemann pas encore arrivé, il n’y a personne pour diriger la Tétralogie de Wagner à l’Opéra de Dresde (dont la Staatskapelle est l’orchestre permanent) à partir du… 21 février. Ne sortons pas pour autant les mouchoirs : Luisi est aussi directeur de l’Orchestre Symphonique de Vienne, il succédera à Franz-Welser-Möst à l’Opéra de Zürich en 2012, et il ne s’était apparemment pas apitoyé en son temps sur le sort de son prédécesseur à la tête de la Staatskapelle de Dresde, renvoyé pour lui laisser la place, et qui n’était autre que Bernard Haitink. Car enfin, si une blanche vaut deux noires, Haitink, comparé à Luisi et Thielemann, vaut bien une ronde.

dimanche 7 février 2010

Charlemagne se croit à l’opéra, pas Obama


Dans les années 1960, les Who voulaient donner leur opéra rock Tommy au Palais Garnier. Horreur des abonnés. Un demi-siècle plus tard, le compositeur italo-anglais Marco Sabiu lance - sur disque et, espère-t-il, sur scène - l’opéra metal symphonique. Le titre : Charlemagne, par l’épée et par la croix. La vedette : Sir Christopher Lee, quatre-vingt-sept ans, Dracula en chef du cinéma d’horreur britannique des années 1960, récemment relancé par Le Seigneur des anneaux de Peter Jackson. Rien de subversif dans tout cela, bien sûr. Le metal est plus poli que heavy, et Sabiu s’est rappelé qu’il avait travaillé avec Pavarotti. Encore une comédie musicale qui veut se donner des lettres de noblesse. A l’époque des Who, le seul nom d’opéra faisait fuir les beaux esprits, et le trio Pierre Boulez - Jean Vilar - Maurice Béjart achevait de le passer au Kärcher dans un rapport commandé par André Malraux. Aujourd’hui, Pascal Dusapin le partage avec Luc Plamondon et Jean-Pierre Pilot, l’un des compositeurs de Mozart, l’opéra rock. Mais personne, dans ce Mozart néo-disco n’a pour ancêtre l’auteur de Don Giovanni, alors que Christopher Lee affirme descendre par sa mère de l’Empereur à la barbe fleurie.

Au moins Hope, le spectacle qui fait fureur à Francfort, est moins ambitieux. Il ne se pare pas du beau nom d’opéra, comme naguère Nixon in China de John Adams et Peter Sellars, mais simplement d’« Obama musical story ». On y voit Mr President chanter « Yes we can » en duo avec Hilary Clinton, tandis que le public a la possibilité d’accompagner la musique au moyen du « plus petit tambour du monde » intégré à chaque siège. Une idée pour un futur opéra participatif ?

Charlemagne, by the Sword and the Cross. Opéra metal symphonique de Marco Sabiu. Dans les bacs le 15 mars.
Hope, Obama musical story. Jarhunderthalle, Francfort, Allemagne
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samedi 6 février 2010

L’opéra en direct au cinéma : après le Met de New York, l'Opéra de Paris ?

Que n’a-t-on dit (et écrit) sur l’opéra à la télévision : glottes en close up, regards cherchant le chef plutôt que le (la) partenaire, choristes déconcentrés, plans larges réduisant les personnages à l’état de lilliputiens, son trafiqué. Or voilà que ce qui marche actuellement, c’est l’opéra au cinéma : glottes géantes, regards… Soixante salles en France, neuf cents dans le monde entier retransmettent les premières du Metropolitan Opera de New York tout au long de l’année. Le Covent Garden de Londres, le Liceo de Barcelone s’y sont mis. Le 25 juin dernier, quarante-six salles hexagonales ont diffusé en direct et en haute définition Carmen, dirigé à l’Opéra Comique par John Eliot Gardiner. Direct et HD sont les sésames de l’opération. Il y a aussi la sensation, que l’on n’a pas dans son salon, de partager l’événement avec des gens qui, comme vous, se sont déplacés, et qui comme vous, ont envie d’applaudir (ou de siffler) à la fin. Gerard Mortier, directeur de l’Opéra de Paris jusqu’à l’année dernière, détestait le procédé, qu’il qualifiait de tromperie sur la marchandise, invoquant l’indispensable présence des chanteurs et des musiciens, le rayonnement vivant des voix dans un espace privilégié. La diffusion, depuis le Palais Garnier, du spectacle Ballets Russes (tiens, des ballets, pas un opéra), le 22 décembre dernier dans cinquante salles de Roubaix à Toulon, a été un succès, et l’on attend beaucoup de monde ce soir pour Simon Boccanegra depuis le MET, avec Plácido Domingo dans son premier rôle de baryton-Verdi. Dans un théâtre, on est, selon ses moyens, à l’orchestre ou au poulailler. Il y a maintenant ceux qui ne sont pas là, qui paient (le prix du poulailler) pour assister à une représentation virtuelle. Mais avec tout le confort moderne.

Prochains directs du Metropolitan Opera de New York : Simon Boccanegra, de Verdi, avec Placido Domingo (6 février), Hamlet, d’Ambroise Thomas, avec Simon Keenlyside et Natalie Dessay (27 mars), Armida, de Rossini avec Renee Fleming (1er mai).

vendredi 5 février 2010

Gershwin par Spielberg, un biopic in blue

Mr Spock (sans les oreilles) en Gershwin : c’est Zachary Quinto, connu pour avoir incarné au cinéma le personnage de Star Trek, que Steven Spielberg a choisi pour être le compositeur de Porgy and Bess dans le film qu’il s’apprête à tourner. Encore un biopic en perspective, mais dont le héros, mort en 1937, n’est pas une figure familière des petits et grands écrans, tels Piaf ou Gainsbourg. Ca tombe bien : physiquement, Zachary Quinto ne ressemble pas du tout à Gershwin. En revanche Spielberg, comme lui fils d’émigrés juifs devenu roi de l’Amérique, est un peu son double. Grosse différence : Gershwin est mort à trente-huit ans, Spielberg en a soixante-quatre.
Tout est spectacle, dans la vie de Gershwin, et l’on regrette que Sergio Leone n’ait pas en son temps tourné un Il était une fois en Amérique II dont il aurait été le héros. Il est vrai que la furie du biopic est plus récente, qui veut que les stars ne soient plus elles-mêmes, mais se glissent dans la peau d’autres stars du passé ou du présent. En attendant, Spielberg s’apprête à sortir un autre biopic, le plus risqué de tous, surtout en France et en Belgique : un Tintin en 3 D. Parce que maintenant, on ne se contente plus de créer des clones de nos idoles, il faut encore qu’ils soient en relief.

jeudi 4 février 2010

A Genève, une Lulu classée X par Olivier Py


Une vieille lune, le cinéma interdit au moins de dix-huit ans? Que dire alors de l’opéra « déconseillé » aux moins de seize ans, pratiqué par le Grand Théâtre de Genève à propos de Lulu d’Alban Berg dans la mise en scène d’Olivier Py, dont la première a lieu ce soir ? Déjà en 2005, Tannhäuser de Wagner façon Py, un spectacle assez classique mais dans lequel un harder apparaissait en état de marche, avait fait l’objet du même avertissement. Aucune restriction en revanche, pour la « Trilogie du Diable » (Le Freischütz de Weber, Les Contes d’Hoffmann d’Offenbach, La Damnation de Faust de Berlioz) proposée en 2008 par le même Py, l’Esprit qui dit non étant, c’est bien connu, moins dangereux que le corps qui dit oui. Pour justifier le fait que dans Lulu, on voit, en guise d’interlude filmé (prévu par Berg), un extrait de film X, le Grand Théâtre manie la circonvolution textuelle : «Pour traduire les intentions du compositeur et de son inspirateur Frank Wedekind, Olivier Py et son équipe ont fait appel à des images qui, quoi que de plus en plus usuelles et répandues, restent rares et inhabituelles sur une scène lyrique et pourraient choquer un spectateur non averti. Respectueux du regard de chacun ainsi que de ses opinions, il nous paraît important de vous en informer avant votre entrée en salle ou avant l’achat de votre billet. Nous déconseillons le spectacle aux personnes de moins de 16 ans ». Quand le cinéaste suisse Daniel Schimd, réputé sulfureux et décadent, a monté Lulu à Genève en 1985, le spectacle n’était déconseillé à personne. Mais à l’époque, la seule vue d’un minaret érigé vers le ciel n’éveillait pas de coupables pensées.

Lulu, d’Alban Berg. Mise en scène : Olivier Py ; direction musicale : Marc Albrecht. Grand Théâtre de Genève, les 4, 7, 10, 13, 16, 19 février.

mercredi 3 février 2010

Lang Lang, Ronaldo du piano, transféré chez Sony

Selon le journaliste anglais Norman Lebrecht, Lang Lang est en passe de quitter Deutsche Grammophon pour Sony Classical. Coût du transfert : 3 millions de dollars. De quoi faire ricaner un footballer de deuxième Division, mais sur le marché classique, du jamais vu depuis Pavarotti. Bogdan Roscic, le nouveau directeur du département classique de Sony en veilleuse depuis plusieurs années, avait besoin de frapper un grand coup. C’est chose faite avec le prodige qui a réalisé le rêve de quarante millions de jeunes Chinois arrimés à leur piano dans l’espoir de conquérir le monde, le Little Bouddha qui a joué, pour l’ouverture des Jeux Olympiques de Pékin, devant cinq milliards de téléspectateurs. Lang Lang avait déjà un pied dans la place, puisqu’il avait, en homme d’affaires et en philanthrope avisé (il est, entre autres, ambassadeur de l’Unicef) signé en 2008 un contrat commercial avec Sony. DG, en attendant, a perdu ses deux champions sur un marché extrême oriental en plein essor : Yundi Li, l’autre prodige de l’Empire du Milieu, vient de signer chez EMI, lassé d’être maintenu dans l’ombre de son encombrant compatriote. Selon son propre aveu, le bonheur de Lang Lang sera complet quand le monde musical occidental le considérera comme un artiste, et non plus comme un phénomène. Mais cela, ça ne s’achète pas.

mardi 2 février 2010

La folle Journée est finie, plus qu’un an à tenir

La 16ème Folle Journée se termine. 128 000 billets (sur 130 000) ont été vendus à Nantes, 60 218 pour la Folle Journée en région (une semaine avant la « grande »), en attendant Bilbao en mars, le Japon en mai, Varsovie en juin. Il y avait Radio France en direct et Arte délocalisé pour l’occasion. Les 11 000 exemplaires du disque officiel ("Le Journal musical de Chopin", par six pianistes, chez Mirare) sont partis en trois jours. On repense en soupirant au bruit, à la foule, aux files d’attente, à tout ce à quoi on tente d’échapper le reste du temps, mais qui, l’espace d’un week-end, a entretenu une délicieuse excitation. On se revoit dans les salles de conférence éclairées au néon, qui, rebaptisées Salle Mickiewicz ou Salon George Sand, sont devenues les plus cosy des boites à musique. On est tout fier d’y avoir survécu, avec la tête transformée en shaker à sons et à images, avec un an de magie en réserve. Car entre temps, que faire ? Il y aura bien des concerts, des opéras, des Victoires de la musique en prime time à la télévision. Du tout venant, en somme. En juillet, on ira à Avignon : huit jours de théâtre non stop, au Palais des Papes, mais aussi dans des ateliers, dans des arrières boutiques, dans la rue. On ira au Grand Palais et à Beaubourg voir les expositions phares de l’année, en réservant à l’avance, pour ne faire qu’une heure de queue. Comment faisait-on avant, quand la culture était confidentielle, dispersée, égoïste, élitiste ? L’année prochaine, la Folle Journée sera consacrée aux post-romantiques : Brahms, Liszt, Strauss (Richard), Mahler, Bruckner, l’Ecole de Vienne en cinq jours et deux-cents-cinquante concerts. Le plus frustrant, c’est de se dire que pendant qu’on assiste à un concert, on en rate dix. A moins que ce ne soit cela, le vrai plaisir.

lundi 1 février 2010

L’escalier piano, un gadget d’enfer


Quand la musique devient nuisance… Tout a commencé l’année dernière à Stockholm, où Volkswagen (les voitures) et le site rolighetsteorin.se ont fomenté un coup médiatique en dotant la station de métro Odenplan d’un « escalier piano ». Chaque marche foulée émet une note, et le tout a l’aspect d’un clavier géant, avec touches noires et touches blanches. La fréquentation de l’escalier a grimpé de 66%, celle de l’escalator adjacent a baissé d’autant, et la vidéo fait un tabac. Ce que l’histoire ne dit pas, c’est qu’aux heures d’affluence, ce gadget monumental fait un bruit d’enfer, et que les employés de la station n’en peuvent plus. L’idée n’est pas neuve : les musical stairs des Musées des Sciences de Minneapolis et de Boston ont amusé plusieurs générations d’Américains, et les amateurs de nanars cinématographiques se souviennent de Big (1988), où Tom Hanks foulait un « plancher piano » resté dans les annales (la scène a été parodiée chez Les Simpsons).

Or voilà que le métro de Milan vient d’installer un « escalier piano » à la station Duomo, très fréquentée par les touristes. Quand on sait qu’en italien, escalier musical se dit scala musicale et que le Duomo (la cathédrale) n’est pas loin du Teatro alla Scala, on apprécie la finesse du concept. Aucun jeu de mots n’est apparemment possible entre escalier musical et Opéra Bastille. Cela épargne peut-être les oreilles des usagers de la RATP.