vendredi 19 mars 2010

Faust de Philippe Fénelon au Palais Garnier : « Je t’aime, moi non plus »

Création parisienne de Faust, à l’Opéra. Faust, une création ? Oui, celui de Philippe Fénelon, un des derniers en date, après ceux de Pascal Dusapin (Faustus, the last night) et de John Adams (Doctor Atomic). Gounod et Berlioz sont bien loin. Il ne s’agit pas d’une vraie création, puisque l’œuvre a déjà été donnée en 2007 au Capitole de Toulouse. Est-ce pour cela qu’on n’en parle pas beaucoup ? Pas seulement, bien sûr. Ce Faust, inspiré de Lenau et non de Goethe, est un grand morceau de poésie philosophique, dont Fénelon a fait une sorte d’oratorio en sept tableaux, un prologue et un épilogue, paré d’une musique truffée de références et de citations, et illustré par une mise en scène spectaculaire mais glacée du scénographe Pet Halmen, qui en accentue le côté rituel. C'est-à-dire qu’on n’est pas là pour s’amuser, mais au moins pour réfléchir, en tout cas pour faire appel à toute la culture philosophique dont on dispose. Toujours le même paradoxe : pour offrir à l’opéra un hypothétique avenir, on tente de l’exorciser, de le rendre digne de le faire coexister avec la musique « pure ». Alors que faire ? Obliger Dusapin et Fénelon à composer comme Andrew Lloyd Weber, voire à faire des « à la manière de » Puccini ? « Ridicule ! », direz-vous (et vous aurez raison de le dire). Fénelon est un passionné d’opéra, il a écrit des textes éclairants sur les chefs-d’œuvre du répertoire (Histoires d’opéras – Actes Sud, 2007). Alors pourquoi son Faust est-il si raide, si pompeux, si conforme au « Je t’aime, moi non plus » dont le genre souffre depuis un demi-siècle ? Est-ce parce qu’à la création de son Salammbô tiré de Flaubert, en 1998 à l’Opéra Bastille, il a été qualifié de Saint-Saëns du XXème siècle ? Quand verra-t-on un ouvrage nouveau créer l’événement, et ne pas être soupçonné de répondre seulement à une obligation du cahier des charges ?

Crédit photo : Opéra national de Paris/ Mirco Magliocca


Faust de Philippe Fénelon. Mise en scène et décors : Pet Halmen. Direction musicale : Bernhard Kontarsky- A l’Opéra de Paris, Palais Garnier, les 20, 23, 29 et 31 mars.

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